l'écriture ou la vie
- jacantigone
- 10 juin 2024
- 2 min de lecture
C'est le titre d'un livre de Jorge Semprùn. Franchement, je vais pas vous faire la page Wikipédia mais pour donner un peu de contexte : c'est un livre qui se demande comment raconter la déportation. Et comment vivre.
Je suis pas assez con que pour me comparer aux victimes de camp de concentration, rassurez vous. Mais ce titre, je l'ai toujours trouvé incroyable.
Ecrire le passé, c'est tenir en vie ce qui est déjà mort. Contempler les cadavres qui n'existent plus, parfois un peu trop littéralement. C'est se tuer aussi, replonger la tête dans la souffrance.
Je comprends ça. Pas sa souffrance, bien sûr. Mais ce besoin d'écrire des mots qui ne viennent pas, ce besoin paradoxal de se souvenir pour pouvoir mieux oublier.
Toute mon adolescence, j'ai tenu des carnets. Ce n'était pas vraiment un journal. Il n'y avait pas de dates, pas de régularité, pas d'obligations. Puis, le monde extérieur n'y avait que peu de place, j'aurais fait une très mauvaise Anne Frank. Les différents moments sont relativement courts, toujours précédé de la mention "nouveau jour". Parfois "nouvelle heure" si j'écrivais deux fois en une journée.
Au début, le carnet m'était vital. Je me souviens d'avoir pleuré beaucoup quand je l'oubliais une semaine chez l'un de mes parents. En partant de la maison, j'ai de moins en moins écrit, enfin je crois que c'est ça qui s'est passé.
Je sais qu'à mes 18 ans j'ai commencé un roman et que pendant le Covid il a comblé toute la brèche. Je me suis exprimé autrement. Puis j'ai écrit des lettres, pas mal de lettres à un homme des montagnes.
Je n'ai jamais relu les carnets, j'ai pas eu le courage.
Plus tôt cette année (je ne parle qu'en année scolaire, la vie d'étudiant) j'ai commencé une autofiction. Un projet bien prétentieux s'il n'était pas tant le reflet de cette écriture comme besoin de vivre. Je peux rien y faire, ça revient me hanter. La preuve, maintenant j'ai un blog narcissique. Le récit (je sais pas trop quel statut lui donner) s'appelle Placard.
Si j'ai le courage je publierai ici des extraits. Tant qu'à écrire, autant que quelqu'un lise, pas vrai ? Si un jour ça devient quelque chose, que la boue forme le golem, j'aimerais y mettre des passages de carnet.
J'espère que ça fera comme dans cette chanson de Fabrizio de André : "dai diamanti non nasce niente, dal letame nascono i fior", il ne naît rien des diamants, du fumier naissent les fleurs.

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